Pour les redevables ayant réalisé un chiffre d’affaires de moins de 7 630 000 € au cours de l’exercice ou de la période d’imposition, ramené s’il y a lieu à 12 mois, le taux de l’impôt sur les sociétés (IS) applicable au bénéfice imposable est fixé, dans la limite de 38 120 € de bénéfice imposable par période de 12 mois, à 15 % pour les exercices ouverts depuis le 1-1-2002 (CGI art. 219, I-b dans sa rédaction alors applicable). Par ailleurs, sont exonérés de contribution sociale sur l’IS les redevables ayant réalisé un chiffre d’affaires de moins de 7 630 000 € (CGI art. 235 ter ZC, I dans sa rédaction alors applicable). Pour bénéficier de ces dispositifs, le capital des PME doit être entièrement libéré et détenu de manière continue pour 75 % au moins par des personnes physiques ou par une société répondant aux mêmes conditions dont le capital est détenu, pour 75 % au moins, par des personnes physiques.
À l’issue de la vérification de comptabilité d’une société, l’administration fiscale a remis en cause, d’une part, l’application du taux réduit d’IS dont cette société avait entendu bénéficier au titre de l’imposition des résultats de ses exercices clos les 31-10-2013 et 31-10-2014 et, d’autre part, l’exonération de contribution sociale sur l’IS au titre de l’imposition des résultats de son exercice clos le 31-12-2014 au motif que la condition tenant à la détention du capital n’était pas remplie. Elle relevait qu’à la clôture des exercices clos au 31-10-2013 et 31-10- 2014, le capital de la société était partagé entre des personnes physiques qui en détenaient 50,13 % et la société elle-même qui, à la suite de sa fusion-absorption avec une autre société qui était son associée à 99,99 %, détenait désormais 49,87 % de ses propres actions.
Toutefois, la société soutenait que la détermination du seuil de 75 % devait être réalisée en neutralisant les actions auto-détenues par la société. Elle s’appuyait sur les dispositions de l’article L 225-210 du Code de commerce, applicables aux SAS en vertu du 3e alinéa de l’article 227-1 du même Code, selon lesquelles les actions possédées par la société ne donnent pas droit aux dividendes et sont privées du droit de vote, pour prétendre que 100 % des droits de vote et des droits aux bénéfices étaient détenues par des personnes physiques et qu’elle satisfaisait donc à la condition de l’article 219, I-b du CGI, alors même que celles-ci ne détenaient que 50,13 % de ses actions.
Le tribunal administratif de Paris a jugé au contraire que cette condition de détention du capital devait s’apprécier en tenant compte des actions auto-détenues par la société et a rejeté la demande de la société tendant à la décharge des impositions supplémentaires. La cour administrative d’appel de Paris a confirmé le jugement du tribunal (CAA Paris 7-12-2022 n° 21PA06553). La société requérante se pourvoit en cassation contre l’arrêt rendu par la cour administrative d’appel de Paris.
Le Conseil d’État juge qu’en réservant le bénéfice du taux réduit d’IS et celui de l’exonération de contribution sociale sur l’IS aux sociétés qui sont détenues de manière continue, à 75 % au moins, par des personnes physiques ou par des sociétés elles-mêmes directement détenues, dans la même proportion, par des personnes physiques, le législateur a entendu restreindre le champ de ces dispositifs favorables à des PME détenues de manière prépondérante et suffisamment directe par des personnes physiques, afin de garantir leur indépendance à l’égard de sociétés tiers.
Il en conclut qu’eu égard à l’objet de cette condition, le respect du seuil de détention du capital s’apprécie en faisant abstraction de la part de son capital que la société détient, le cas échéant, en propre. L’administration fiscale n’était donc pas fondée à prendre en compte, pour apprécier le respect du seuil de détention du capital, les actions de la société détenues en propre par cette dernière. L’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris est donc annulé.
À noter. Par cette décision, le Conseil d’État reprend son interprétation de la condition de détention du capital qu’il avait retenu pour l’exonération de la contribution sociale prévue à l’article 235 ter ZC, I du CGI (CE 20-3-2020 n° 410930) et l’étend à celle figurant à l’article 219, I-b du CGI pour l’application du taux réduit d’IS.
CE 30-7-2024 n° 471055.
© Lefebvre Dalloz