Loi Marché du travail

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Démission présumée en cas d’un abandon de poste volontaire

La loi Marché du travail instaure une présomption de démission lorsque le salarié quitte son poste volontairement.

Face à un abandon de poste d’un salarié, qui désorganise la bonne marche de l'entreprise, l'employeur est contraint de prendre l'initiative de la rupture du contrat de travail et de licencier le salarié pour faute grave. En cas de contestation du licenciement par le salarié, l’issue de cette action reste incertaine pour l’employeur.

Une mise en demeure pour agir face à un abandon de poste. Si un salarié a abandonné volontairement son poste de travail et ne reprend pas le travail, l’employeur pourra le mettre en demeure, par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, de justifier son absence et de reprendre son poste dans un délai fixé par l’employeur.

Si le salarié ne justifie pas de son absence (par un motif légitime) et ne reprend pas le travail dans le délai que lui a accordé l’employeur, il sera présumé avoir démissionné à l’expiration de ce délai. Ainsi, la date d’expiration du délai laissé au salarié pour reprendre son travail constituera la date de la rupture de son contrat de travail.

Ce délai sera fixé à un minimum par un décret qui déterminera également les modalités d’application de cette nouvelle procédure pour abandon de poste (Loi art. 4 ; C. trav. art. L 1237-1-1, al. 1 nouveau).

À noter. La démission du salarié sera présumée à condition que celui-ci ait abandonné volontairement son poste de travail. Si le salarié a été contraint par les agissements de l’employeur d’abandonner son poste, la démission ne pourra pas être présumée.

Une procédure accélérée de contestation devant le juge prud’homal. Cette présomption de démission en cas d’abandon de poste volontaire est une présomption simple. Le salarié pourra la combattre en contestant la rupture de son contrat de travail devant le conseil de prud’hommes.

Si le salarié entend contester la rupture de son contrat de travail sur le fondement de cette présomption de démission, il pourra saisir le conseil de prud’hommes. L’affaire sera alors directement portée devant le bureau de jugement, qui devra se prononcer sur la nature de la rupture et les conséquences associées. Il devra statuer au fond dans un délai d’un mois à compter de sa saisine (Loi art. 4 ; C. trav. art. L 1237-1-1 al. 2 nouveau).

 

CDD ou contrat de mission multi-remplacements

La loi Marché du travail crée une nouvelle expérimentation pour permettre à l’employeur de conclure un seul contrat de travail à durée déterminée (CDD) ou un seul contrat de mission d’intérim pour remplacer plusieurs salariés absents de l’entreprise en même temps ou successivement.

Un seul CDD ou contrat de mission pour remplacer plusieurs salariés. À titre expérimental et par dérogation aux articles L 1242-2, 1° et L 1251-6, 1° du Code du travail, les employeurs appartenant à certains secteurs d’activité à définir par décret vont pouvoir conclure un seul CDD ou un seul contrat de mission de travail temporaire pour remplacer plusieurs salariés de l’entreprise. Cette expérimentation ne pourra avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise (Loi art. 6, I).

Expérimentation temporaire. Cette expérimentation s’appliquera pendant 2 ans à compter de la publication de ce décret définissant les secteurs concernés (Loi art. 6, II).

Rappel. Cette expérimentation rappelle celle mise en place par la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel du 5-9-2018, du 1-1-2019 au 31-12-2020, qui avait permis, par dérogation, la conclusion d’un seul CDD ou d’un seul contrat de mission pour remplacer plusieurs salariés de l’entreprise appartenant à l’un des 11 secteurs d’activité suivants : sanitaire, social et médico-social ; propreté et nettoyage ; économie sociale et solidaire ; tourisme en zone de montagne ; commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire ; plasturgie ; restauration collective ; sport et équipements de loisirs ; transport routier et activités auxiliaires ; industries alimentaires ; services à la personne (Loi 2018-771 du 5-9-2018 art. 53 ; Décret 2019-1388 du 18-12-2018).

 

Durée illimitée de la mission en CDI intérimaire

Suppression de la durée maximale de 36 mois. Une entreprise de travail temporaire peut conclure avec un salarié un contrat de travail à durée indéterminée (CDI) pour l'exécution de missions successives (C. trav. art. L 1251-58-1). La durée totale de la mission du salarié lié par un CDI intérimaire est au maximum de 36 mois (C. trav. art. L 1251-58-6).

La loi Marché du travail supprime cette durée maximale spécifique de 36 mois applicable aux missions d’intérim réalisées dans le cadre du CDI intérimaire et écarte l’application au CDI intérimaire de la durée totale maximale de 18 mois du contrat de mission classique (Loi art. 7 ; C. trav. art. L 1251-58-6 modifié).

Ainsi, la durée de la mission du salarié intérimaire embauché en CDI n’est plus plafonnée à compter de l’entrée en vigueur de la loi.

 

Refus d’un CDI après un CDD ou un contrat de mission

Proposition de poste en CDI à un salarié en CDD. Si l’employeur propose à un salarié recruté en CDD la poursuite de leur relation contractuelle de travail après l’échéance du terme du CDD sous la forme d’un CDI pour occuper le même emploi ou un emploi similaire, assorti d’une rémunération au moins équivalente pour une durée de travail équivalente, relevant de la même classification et sans changement du lieu de travail, il doit notifier par écrit au salarié cette proposition de poste en CDI.

Obligation de l’employeur. En cas de refus du salarié, l’employeur doit en informer Pôle emploi en justifiant du caractère similaire de l’emploi proposé. Les modalités d’application de cette mesure seront fixées par un prochain décret (Loi art. 2 ; C. trav. art. L 1243-11-1 nouveau).

Proposition de poste en CDI à un salarié intérimaire. Si, à l’issue d’une mission de travail temporaire, l’entreprise utilisatrice propose au salarié intérimaire de conclure un CDI pour occuper le même emploi ou un emploi similaire, sans changement du lieu de travail, elle doit notifier par écrit au salarié cette proposition de CDI.

Obligation de l’entreprise utilisatrice. En cas de refus de l’intérimaire, l’entreprise utilisatrice doit en informer Pôle emploi en justifiant du caractère similaire de l’emploi proposé. Les modalités d’application de cette mesure seront fixées par décret (Loi art. 2 ; C. trav. art. L 1251-33-1 nouveau).

 

Perte de l’allocation chômage

Lorsqu’un salarié a refusé à deux reprises, au cours des 12 mois précédents, une proposition de CDI à l’issue d’un CDD ou d’un contrat de mission d’intérim pour le même emploi ou un emploi similaire dans les conditions ci-dessus, il perd son droit à l’allocation d’assurance chômage, sauf exceptions légales (C. trav. art. L 5422-1, I-al. 5 nouveau).

 

Prolongation du régime de l’assurance chômage

Détermination temporaire des règles de l’assurance chômage par décret. Par dérogation aux dispositions du Code du travail, le Gouvernement est autorisé, depuis le 1-11-2022, et après concertation avec les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel, à déterminer, par décret, les règles applicables au régime d'assurance chômage jusqu'à une date fixée par décret et au plus tard jusqu'au 31-12-2023 (Loi art. 1er, I-al. 1).

Indemnisation chômage modulée en fonction de la conjoncture. Les conditions d’activité antérieure pour l’ouverture ou le rechargement des droits et la durée des droits à l’allocation d’assurance pourront être modulées en tenant compte d’indicateurs conjoncturels sur l’emploi et le fonctionnement du marché du travail (Loi art. 2 ; C. trav. art. L 5422-2-2).

Ainsi, la durée d’affiliation et la durée d’indemnisation par le régime de l’assurance chômage pourront être modulées en fonction de la situation de l’emploi ; ces durées pourront être endurcies lorsque la situation de l’emploi est défavorable et assouplies lorsque cette situation est plus favorable.

Prolongation du bonus-malus d’assurance chômage. Les règles actuelles applicables jusqu'au 31-1-2023 à la modulation du taux de la contribution d’assurance chômage, dit « bonus-malus » (C. trav. art. L 5422-12), pourront être prolongées, par décret, jusqu’au 31-8-2024.

Cependant, le Gouvernement pourra modifier, par décret, notamment :

  • les périodes de mise en oeuvre de la modulation du taux de contribution d’assurance chômage des employeurs concernés ;
  • et les périodes au cours desquelles est constaté le nombre de fins de contrat de travail et de contrat de mise à disposition pris en compte pour le calcul du taux modulé (Loi art. 1er, I-al. 2).

Information des employeurs sur le nombre de fins de contrat de travail pris en compte pour le calcul du taux modulé. Lorsque l’Urssaf notifie à l’employeur son taux de contribution chômage modulé, elle lui transmet également les données utilisées pour son calcul, à savoir le nombre de rupture imputées à l’entreprise, son effectif moyen annuel, son taux de séparation, le taux de séparation médian.

Pour les taux notifiés aux employeurs pour les périodes courant depuis le 1-9-2022, l’Urssaf peut également communiquer aux employeurs les données néces­saires pour déterminer le nombre de fins de contrat de travail et de contrat de mise à disposition, y compris les données sur les salariés concernés par les fins de contrat prises en compte qui sont inscrits sur la liste des demandeurs d’emploi, dans des conditions prévues par décret (Loi art. 5 ; C. trav. art. L 5422-12, al. 8).

 

Élection au CSE : conditions d’électorat et d’éligibilité

À la suite de la décision du Conseil constitutionnel en date du 19-11-2021 (décision 2021-947 QPC du 19-11-2021, JO du 20) ayant déclaré contraire à la Constitution l’article L 2314-18 du Code du travail en ce qu’il privait les salariés disposant d'une délégation écrite particulière d'autorité leur permettant d'être assimilés au chef d'entreprise ou représentant effec­tivement le chef d’entreprise devant les institutions représentatives du personnel de toute possibilité de participer en qualité d'électeur à l'élection du comité social et économique (CSE), la loi Marché du travail redéfinit les conditions légales pour être électeur à l’élection du CSE à compter du 31-10-2022.

Salariés assimilés à l’employeur électeurs à l’élection du CSE. Depuis le 31-10-2022 sont électeurs l’ensemble des salariés âgés de 16 ans révolus, travaillant depuis 3 mois au moins dans l’entreprise et n’ayant fait l’objet d’aucune interdiction, déchéance ou incapacité relative à leurs droits civiques (Loi art. 8, I et III ; C. trav. art. L 2314-18 nouveau). Ainsi, les salariés assimilés au chef d’entreprise ou représentant celui-ci devant le CSE peuvent désormais voter pour élire les membres du CSE.

Les salariés assimilés à l’employeur non éligibles à l’élection du CSE. Sont éligibles les électeurs âgés de 18 ans révolus et travaillant dans l'entreprise depuis un an au moins, à l'exception des conjoint, partenaire d'un pacte civil de solidarité, concubin, ascendants, descendants, frères, soeurs et alliés au même degré de l'employeur, ainsi que des salariés qui disposent d’une délégation écrite particulière d’autorité leur permettant d’être assimilés au chef d’entreprise ou qui le représentent effectivement devant le CSE (Loi art. 8, II ; C. trav. art. L 2314-19, al. 1 modifié). Sont donc légalement exclus de l’éligibilité à l’élection du CSE les salariés assimilés au chef d’entreprise ou représentant effectivement celui-ci devant le CSE.

 

Réforme de la validation des acquis de l’expérience (VAE)

La loi Marché du travail contient d’importants aménagements de la validation des acquis de l'expérience (VAE) afin de la rendre plus accessible  et de renforcer l’accompagnement des candidats (Loi art. 10 et 11). L’entrée en vigueur de la réforme de la VAE est fixée au lendemain de la publication de la loi au Journal officiel (soit le 23-12-2022), mais de nombreuses mesures nécessitent un décret d’applica-tion pour être mises en oeuvre.

Création d’un service public de la VAE. Un service public de la VAE est créé. Il a pour mission d'orienter et d'accompagner toute personne demandant la validation des acquis de son expérience (C. trav. art. L 6411-1 nouveau). Les missions de ce service public de la VAE seront mises en oeuvre au niveau national par un groupement d'intérêt public (GIP) (C. trav. art. L 6411-2 nouveau).

Extension de l'accès à la VAE. Désormais :

la VAE n'est plus réservée aux seules personnes engagées dans la vie active. En effet, toute personne est en droit de faire valider les acquis de son expérience, notamment professionnelle (C. trav. art. L 6111-1) ;

  • la VAE est désormais ouverte à toute personne qui justifie d'une activité en rapport direct avec le contenu de la certification visée (C. trav. art. L 6411-1 nouveau) ;
  • la condition de durée d'expérience minimale d'un an actuellement requise pour engager une démarche de VAE est supprimée.

Simplification du parcours de validation. Le parcours de validation de VAE comprend un accompagnement, les actions de formation et désormais les périodes de mise en situation en milieu professionnel (C. trav. art. L 6313-5 modifié). Le candidat à la VAE peut désormais être accompagné avant que sa demande soit déclarée recevable (C. trav. art. L 6423-1 abrogé).

Les actions permettant de faire valider les acquis de l'expérience doivent permettre au candidat d’acquérir une certification professionnelle enregistrée au RNCP ou désormais un bloc de compétence d’une certifi­cation professionnelle enregistrée au RNCP (C. trav. art. L 6313-5 modifié).

Un congé pour VAE de 48 heures. Les salariés peuvent demander à leur employeur une autorisation d'absence pour se préparer à la VAE et participer à la session d’évaluation organisée par le ministère ou l’organisme certificateur en tout ou partie pendant leur temps de travail. La durée du congé pour VAE passe de 24 heures à 48 heures par session d’évaluation (C. trav. art. L 6422-2 modifié).

Financement de la VAE par les ATpro. Les commissions paritaires interprofessionnelles régionales (CPIR), appelées aussi « Associations Transitions professionnelles (ATpro) », sont en principe chargées de financer les projets de transitions professionnelles des salariés. Désormais, les ATpro pourront financer les dépenses liées à la VAE du salarié, après avoir vérifié que son projet est réel et sérieux. Les conditions de ce financement restent à définir par décret (C. trav. art. L 6323-17-6 modifié).

Réalisation de la VAE à titre expérimental dans le cadre d'un contrat de professionnalisation. La VAE peut être réalisée, à l'initiative du salarié, en mobilisant son compte personnel de formation (CPF) ou en sollicitant un congé pour VAE ou être proposée par l'employeur dans le cadre du plan de développement des compétences de l’entreprise.

Pour favoriser l'accès à la certification et à l'insertion professionnelles dans les secteurs rencontrant des difficultés particulières de recrutement, la loi Marché du travail prévoit, à titre expérimental, pour une durée de 3 ans à compter d'une date qui sera fixée par décret, et au plus tard le 1-3-2023, que les contrats de professionnalisation conclus par les employeurs de droit privé peuvent comporter des actions en vue de la VAE (Loi art. 11). Les conditions de mise en oeuvre de cette expérimentation, notamment les qualifi-cations ou blocs de certifications professionnelles pouvant être obtenus par la VAE, doivent être déterminées par décret.

 

Sources : Loi 2022-1598 du 17-11-2022 portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi, JO du 22 ; Conseil constitutionnel, décision n° 2022-844 DC du 15-12-2022

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